Un vrai plaisir d'ouvrir le mail du journal du 2M sans savoir si l'on va tomber sur un montage photo, un poème, un texte politique où bien encore -comme aujourd'hui- sur une nouvelle digne d'un scénario d' "X-Files" .
8 feuillets à savourer. Bonne lecture.

PS : si vous avez une idée d'illustration pour ce texte, envoyez-la nous vite !

La Mystérieuse Mère

Le tapotement de l’eau sur les feuilles de palmier, le sifflement de l’air passant par une fenêtre mal fermée, la lumière de l’aube filtrée par les volets, l’odeur d’un chocolat chaud et de croissant frais, le grincement du vélo du facteur, le sillage d’un oiseau d’acier, les pas feutrés d’une femme à travers un corridor.

- Debout Laurent ! Cria sa mère.
- Ce n’est pas parce qu’on est dimanche que tu dois faire la grasse matinée.

Les volets ouverts laissent passer la lumière du matin, le frottement du tissu, le grincement du lit, les yeux qui piquent, agressés par une lumière beaucoup trop forte, des pas qui résonnent dans la tête comme la fraiseuse du dentiste, ils s’éloignent jusqu'à ne plus les entendre, le frottement des ailes d’un vautour en l’air.

Laurent se redresse sur son séant, il se lève en s’appuyant sur son lit. Il s’habille d’un jeans noir, d’un tee-shirt noir sur lequel on peut voir un aigle dessiné au fusain. Il sort de sa chambre, pénètre dans un corridor très ensoleillé par une grande baie vitrée qui fait office de plafond. Le corridor est large, long et très coloré. Il y a beaucoup de tableaux , tous ont été peints par le même artiste, Edouard Hopper. L’intégralité des œuvres représente un homme sur une corniche donnant sur l’océan, mais chacun a quelque chose de différent. Sur un il neige, sur un autre il pleut, etc. ...
Laurent passe le corridor, descend un escalier en colimaçon, façonné dans du cerisier. Il descend trois étages pour être au rez-de-chaussée, où se trouve un jardin d’hiver, un salon, une salle de bains et la cuisine. Il se dirige vers celle-ci, elle est spacieuse, illuminée par une véranda qui donne sur le patio, tout est propre et bien ordonné. Au milieu se trouve une table ronde blanche, au fond il y a la porte fenêtre, à gauche la cuisinière avec le plan de travail, au-dessus des buffets et à droite des armoires blanches. Le sol est fait de catelles blanches et froides.

Laurent se rend au jardin, il suit le chemin de graviers jusqu'à la table. Sur celle-ci s’étend le petit déjeuner, aussi complet que le buffet de la Reine Mère,

- Salut, m’man ? demande-t-il.
Pas de réponse. Marie, la mère de Laurent, est vêtue d’une longue robe, blanche comme le première neige d’octobre, elle a les cheveux blonds et ondulés et une silhouette à faire pâlir toutes les stars d’Hollywood; elle porte des lunettes noires.

- Eh, maman, ça va ! s’inquiète-t-il.
Elle ne répond pas. Marie est figée. Laurent avance sa main pour la toucher et la secouer, il hésite un instant, il prend son courage à deux mains et la touche.
- Ahhhhhhhhhhh ! Hurle-t-il.
Elle est aussi froide qu’un glaçon au milieu de l’Antarctique. Il la secoue énergiquement. Ses lunettes tombent.
- ...................... ! Il ne peut plus s’exprimer. Il a la bouche ouverte, mais rien ne sort.
Sous ses lunettes il n’y a rien ! Ses yeux ont été arrachés.
Laurent court, vers la maison, puis vers sa mère et revient, ainsi de suite. Il est incapable de réfléchir, de penser et même d’avoir la moindre idée. Son cerveau est paralysé de terreur. Doit-il aller chercher de l’aide, partir ou je ne sais quoi encore ? Il décide de partir loin de chez lui ! Mais où ? il ne le sait pas encore, tout ce qu’il sait, c’est qu’il ne veut pas rester ici.

Quelques heures plus tard.

Marie a été retrouvée par la femme de ménage, qui a averti la police. Mais où est le père de Laurent, Georges ? L’autopsie ne révèle rien, mort inconnue, dossier classé. Pourquoi la police ne fait-elle aucune enquête ?

Quelques semaines plus tard.
Le jour des obsèques arrive. Personne n’est venu : ni Laurent, ni Georges, ni aucun membre de la famille, ni aucun ami n’est venu. Pourquoi ? Marie n’a pas de passé, aucun document officiel ne révèle sa trace. Qui est-elle ? Quels sont les secrets que Marie a emportés avec elle ? Pourquoi est-elle morte ? Comment est-elle morte ? Tant de questions mais si peu de réponses.

Le 13 septembre. 1h30 du matin.
Laurent s’approche de la propriété des Favier, sa demeure de toujours. Il avance sa jambe droite dans les fougères, aucun bruit, juste le craquement d’une brindille. Une ombre passe devant lui et s’éloigne vers la maison. Elle entre et referme la porte. Laurent, la peur au ventre, la suit. Il est devant la porte où l’ombre est entrée. Il n’y a aucune trace d’effraction. Il sort ses clefs de son jeans noir, il entre. Il s’introduit à pas feutrés dans le corridor, monte l’escalier en colimaçon, qui grince. Laurent se retrouve dans le corridor où il y a les oeuvres de Edward Hopper. Il s’approche de la chambre de sa défunte mère et ouvre la porte très doucement. De là sort de la lumière, deux personnes parlent de puce électronique.
- Où est cette puce ? dit une voix rauque
- Je ne sais pas ce qu’elle en a fait ! rétorque une autre voix, plus claire.
- Ils y a cinq ans nous lui avons donné toutes les information concernant le président Kennedy. Et là vous me dites que vous ne savez plus où elle est ! cira-t-il.
- Nous pensons savoir où elle est.
- Mais arrêtez de penser, je veux savoir où elle se trouve précisément
- Nous savons que l’agent Alison a subi une opération il y a précisément cinq ans, j’en déduis qu’elle a dû emporter la puce avec elle.
- De quoi a-t-elle été opérée ?
- Nous ne savons pas.
- Il faut que vous la...

Laurent pousse la porte un peu trop fort et les deux hommes s’en aperçoivent. L’un d’eux sort un revolver chromé de son costard trois pièces noir. Laurent referme la porte et s’enfuit le plus vite possible par l’escalier en colimaçon. Bang, Bang entend-il.
n Mais arrête Pieter ce n’est qu’un gamin !

Qui sont ces gens ?
Où est cette puce ?
Que veulent-ils à Marie ?

Le lendemain.

Laurent se réveille sous un vieux pont rouillé. Il est allongé sur la berge, une rivière coule doucement sans accrocs, l’herbe est humide, haute de 5 centimètres. Et par endroit elle est brûlée par le soleil. A côté de Laurent dort un homme d’une quarantaine d’années. Il est habillé d’un jeans troué aux genoux, d’une chemise à carreaux bleus et rouges qui dépasse de son pantalon, il a une veste en cuir noir où il manque une manche et une écharpe enroulée autour de son cou. Son visage est sale et il a une barbe de trois jours, il a des cheveux noirs et hirsutes. Le vent vient de l’est, froid et humide. Le ciel est encombré de nuages noirs et menaçants comme un homme qui montre le poing.
L’homme frissonne, Laurent l’observe. Il ne sait pas quoi faire. Il a mal au ventre. Est-ce parce qu’il a faim ou qu’il a encore peur de la nuit dernière ? Laurent s’appuie contre un Saule pleureur qui n’a sûrement pas autant de chagrin que Laurent, la perte d’une mère est inestimable.
L’homme ouvre un oeil, regarde Laurent quelques secondes et se rendort. Laurent a de plus en plus peur. Est-ce que l’homme est un vagabond ? En tous cas, il doit être rejeté de la société. L’homme se lève, il se met sur ses pieds dans un craquement d’os. Il regarde Laurent, et lui dit :
- Eh ! toi, que fais-tu là ? dit-il d’un ton gorgé d’alcool.
- Euh..., rien m’sieur, je me promène ! rétorque-t-il d’une voix peu assurée.
- Tu es à 10 km de la ville tout seul et tu ne fais rien !
- Oui !
- Arrête de me mentir ! dit l’homme d’un ton calme.
- Je ...... enfin.....euh...
- J’ai tous mon temps.
Et Laurent lui raconte toute son histoire depuis la mort de sa mère.

- Tes parents étaient divorcés ?
- Non, m’sieur.
- Que faisait ton père ?
- Je ne sais pas, il était rarement à la maison, tout comme ma mère.
- Tu n’as pas essayé de joindre ton père ou quelqu’un de la famille ?
- Je n’ai pas de famille et je ne sais où joindre mon père.
- Pauvre de toi ! Dit-il d’un ton compatissant.

Le vent souffle de plus en plus faiblement, juste une légère brise qui soulève les poils.
- Et vous, qui êtes-vous ? demanda Laurent.
- Qui suis-je ? Peut-être un petit enfant qui a voulu faire comme les grandes personnes ou un adulte qui voulait jouer à l’enfant.
- Quel est votre nom ?
- José Renom, je porte mal mon nom ! S’appeler Renom alors que toute ma vie j’ai essayé de le cacher.
- Et quel est votre métier ?
- J’étais dans la mafia russe comme espion. Et depuis que j’ai présenté ma démission, je suis obligé de me cacher. Pendant dix ans j’ai amassé beaucoup d’argent : en volant, pillant et tuant, maintenant, je ne peux pas l’utiliser de peur de me faire tuer et c’est très bien comme ça.
- Vous avez vraiment tué des gens de vos mains ?
- Oui, malheureusement, ne le fais jamais, c’est horrible !

Une bourrasque de vent, une rivière, de l’herbe mouillée, un saule, un pont rouillé et une perle sur la joue d’un homme qui a fait souffrir.

Pendant un long moment ils ne disent rien, mais Laurent reprend :
- Pourriez-vous m’aider à retrouver le salaud qui a tué ma mère, pour lui poser une seule question : pourquoi ?
- Toujours la même question : pourquoi, pourquoi il n’y a jamais d’autres questions ! dit-il d’un ton irrité.
- Il est facile de tuer quelqu’un, mais il est bien plus difficile de perdre la seule personne qui compte dans votre vie et de même pas savoir pourquoi !
- Je suis désolé de m’être emporté, mais ne crois pas qu’il est facile d’enlever la vie à une personne.
- Vous m’aidez ou je me débrouille ?
- Franchement je ne sais pas !
- Même pas pour tous le mal que vous avez fait aux autres ?
- Bon je crois que je ne peux pas dire non à cette question.
- Super ! par où en commence ?
- Euh... pas aller chez toi et voir si il n’y a pas d’indices.
- OK !

Le soir même le duo s’introduit dans la propriété des Favier. La nuit est éclairée pas une galette de miel et le vent n’est plus qu’un souvenir. Les deux ombres s’approchent de la maison et y entrent à l’aide de la clef de Laurent. Le rez-de-chaussée est resté identique au dernier soir, tout comme le reste de la maison, sauf la chambre de Marie que est sans dessus dessous.

- Que cherchons-nous ? demande Laurent.
- Je n’en sais trop rien, un bout de tissu, une boîte d’allumettes ou n’importe quoi qui peu nous mettre sur une piste, dit José d’une voix claire.

Le lit est complètement défait : les draps, les habits le matelas sont à même le sol. La coiffeuse est renversée.

- Je vois que ta mère aimait l’ordre ! dit José d’un ironique.
Tout en remettant les choses en place, José trouve une photo de Marie :
- C’est ta mère ?
- Oui, c’est elle.
- Je la connais, elle travaillait avec la CIA. Et l’homme à côté d’elle, c’est ton père ?
- Oui !
- Je le connais aussi. C’est une membre de la mafia russe. Alison, je l’ai....
- Qui est Alison ? Interrompt Laurent. Il connaît déjà la réponse, mais il veut l’entendre.
- C’est ta mère, Alison est son nom de travail, si tu veux. Je l’ai rencontrée lors d’une mission en Suisse, je devais descendre Sadam Hussein, j’y suis presque arrivé, mais ta mère m’en a empêché et ton père je le connais bien, c’était mon supérieur! dit José d’un ton compatissent. Récapitulons : nous savons que ta mère s’appelait Alison et Marie et qu’elle faisait partie de la CIA, que ton père s’appelle Pieter et Georges et qu’il est membre de la mafia russe et son nom de travail est Pieter.
- Je connais ce nom ! dit Laurent d’un ton affolé, la nuit où je suis venu ici un homme voulait me tuer, mais son collègue l’en a dissuadé.
- Tu est tombé dans une drôle de famille, mon petit, nous pensons également qu’Alison est morte pour une histoire de puce électronique et de l’affaire Kennedy. J’ai quelques amis bien placés à la CIA qui pourront nous aider.

Deux jours plus tard.

Le duo se retrouve au siège de la CIA. C’est un grand bâtiment blanc, avec beaucoup de fenêtres où le soleil se reflète. La rue est encombrée de voitures et de camions. Les deux hommes ont de la peine à avancer, ils réussissent enfin à traverser au bout d’une dizaine de minutes, ils entrent dans le bâtiment. José, qui a troqué ses haillons pour un costard noir, traverse le hall pour prendre l’ascenseur, il sait exactement où il doit aller. Ils montent au treizième étage et entrent dans un bureau. José avance vers un coffre et y inscrit la combinaison.

- Pourquoi n’y a-t-il personne ? demande Laurent.
- Je m’en suis occupé hier pour qu’on soit tranquilles ! rétorque José.

José sort un dossier où en peut lire dessus « Alison », il l’ouvre et y découvre ceci :
Marie Favier, alias Alison est détentrice de deux puces électroniques, qu’elle a caché dans ses yeux. Ces puces contiennent toutes les informations concernant l’assassinat du président Kennedy, dont elle-même y est impliquée. Pour des raisons de sécurité tout son passé et sa famille ont étés détruits.
Les deux hommes se regardent. José sort de sa poche un revolver chromé et tire deux coups de feu. Laurent tombe sans jamais quitter des yeux son agresseur. A l’instant, José ressent une profonde douleur dans le cœur.

BOUM...

Antoine (Tonio ou le petit Suisse)
Martinel@2nd-world.fr